CONTRIBUTIONS DES DOCTORANTS

 

À la recherche de la scientificité de l’Histoire

Au sein de l’introduction du premier cahier d’English Historical Review, on a la possibilité de lire les mots suivants : « Loin de nous adonner à définir la vraie histoire comme ennuyeuse, nous sommes plutôt d’avis que l’histoire ennuyeuse demeure une histoire bien médiocre, et nous estimerions le mieux les collaborateurs qui pourraient présenter leurs recherches sous une forme claire, efficace mais surtout convaincante. » Le compromis postulait qu’au dénouement de la rupture entre les sciences rigides (positives) et les arts libres (romantiques) lors de la première partie du XIXe siècle, l’historiographie pourrait occuper un espace neutre, à travers lequel les deux cultures s’uniraient et contribueraient à l’atteinte des buts d’une société civilisée.

Selon la revue, ce sont deux approches qui prédominent au milieu du XIXe siècle : la première renvoie à la rédaction de l’histoire en tant que commentaire des événements politiques de l’époque dont elle fait partie, tandis que l’autre remonte plus en haut en se concentrant sur tous les événements possibles qui au sein d’une certaine époque se sont déroulés. De l’autre côté, la revue, elle, prend du recul envers ces deux formulations et souligne que toutes rédactions dites historiques traitant des controverses contemporaines seront rejetées. En plus, la rigidité méthodique, pour laquelle la revue en question plaidait le plus, ainsi que l’appel aux approches scientifiques de l’histoire, constituent la partie principale de la revue sans que personne ne sache vraiment en quoi cette approche consiste.

Afin de rendre claire une autre approche de l’histoire de l’époque et de la manière dont elle devait être professionnalisée, je me permets de vous présenter une autre source traitant de ce sujet. Il s’agit de la Historische Zeitschrift dont la préface parvint à éveiller mon intérêt. Elle reformule les thèses de la revue britannique et représente l’histoire en tant que continuum scientifique. En plus, la revue allemande soutient l’histoire dont les intentions ne se trouvent pas dans les limites d’une science antiquaire ou politique ou, mieux dit, l’histoire n’a pas la permission de se soumettre à de telles bornes. D’un côté, la tâche de l’histoire n’est pas à être trouvée dans le domaine du politique, ce qui comprendrait une approche consistant plutôt en une description minutieuse des questions de la politique moderne. En même temps, les termes comme le féodalisme, qui ne font qu’asséner à la vie en pleine évolution des éléments bel et bien disparus, le « radicalisme », qui sous-entend le conflit des pensées tyranniques personnelles et du procédé organisationnel de toute société, le « ultramontanisme », se référant au développement spirituel d’une certaine autorité en dehors les limites de l’Eglise ; tout cela sert de preuve que la professionnalisation du métier historique comprenait tout un éventail d’implications politiques, tandis que la « théorie », sur laquelle reposerait la scientificité de l’histoire, n’est rien d’autre qu’une idéologie du domaine du milieu du spectre social dont les limites sont représentées par les libéraux d’un côté et les conservatifs de l’autre.

Ainsi, les philosophes et les historiens allemands et français, qui frôlaient le côté gauche de la structure politique de l’époque, étaient-ils victimes des persécutions remontant tout en haut de l’échelle politique, sociale et intellectuelle. Déjà en 1818, Victor Cousin et François Guizot furent éloignés de la Sorbonne pour avoir instruit leurs étudiants en leur transmettant des « idées » au lieu des « faits ». Ludwig Feuerbach et David Friedrich Strauß connurent le même destin à Berlin. En 1850, la France tombait lentement dans l’obscurité du régime napoléonien et la liberté d’instruction fut abolie dans le but de protéger la population des idées du socialisme et de l’athéisme. Michelet, Edgar Quinet ainsi que le poète polonais Adam Mickiewicz furent renvoyés, la lecture et la distribution de « livres dangereux » furent interdites, et les

 

Roland Barthes